mercredi 27 août 2008

Défi 2

Ou oui j'aime détourner les thèmes
Et Oui, je ne sais pas comment on souligne là dessus.
De toute façon, le rouge, c'est classe.


Thème : Cette fois pas de phrases imposées, mais plusieurs contraintes.

- Un dialogue
- Un minimum de 3 personnages ( présents dans la scène et non évoqués)
- La description d'un lieu clos.


Paradis d'oubli


Il n’y avait ni mur, ni fenêtres, ni même un coin. La pièce était parfaitement ronde. Et pas une demi-sphère dont le sol coupait l’arrondi. Une boule pleine. Sous ses pieds, elle pouvait voir une rotonde blanche identique à celle qui la surplombait. Pour une raison étrange, elle flottait au milieu. Peut-être la boule était-elle en train de tomber ? Mais dans ce cas là, elle sentirait la chute au creux de son ventre. Et puis elle serait plaquée contre la partie supérieure, au lieu de flotter tranquillement au centre. Donc la sphère était immobile, et sans aucune gravité. Elle pouvait dresser ses pieds indifféremment dans n’importe quelle direction, le sang ne lui montait pas à la tête. Au début, elle avait essayé d’aller les parois d’un blanc de neige, mais c’était la seule limite. Elle ne pouvait pas quitter le centre.


Elle était restée un petit moment à lancer des regards mauvais aux murs, mais ils n’avaient pas été impressionnés, aucune porte ne s’était dévoilée. Ensuite, elle s’était agitée dans tous les sens, tentant de trouver un appui pour se propulser. En vain. Maintenant, elle s’était recroquevillée, en attente. Histoire de tromper l’ennuie, elle donnait régulièrement des coups de pieds dans l’air, ce qui la faisait tourner sur elle-même avec une lenteur empreinte d’une certaine solennité. Depuis qu’elle était arrivée là, quels que soient le pourquoi et le comment, elle se sentait d’une humeur grave. Pas triste, mais plutôt, sérieuse. Ses mouvements s’accordaient agréablement à cet était d’esprit. Un tour, deux tours, trois tours, les murs étaient toujours égaux à eux même. Quatre tours, cinq tours, six tours, il y avait quand même un problème. Sept tours, elle avait trouvé. Où qu’elle porte son regard dans l’intérieur de la sphère, elle n’avait pas d’ombre. Gardant toujours la même allure, elle fit un huitième tour. Non. Ni au dessus, ni en dessous, ni sur les côtés. Voilà qui pouvait donner à réfléchir, mais comme tout le reste, elle serait sans doutes incapable d’en découvrir le fin mot tant qu’elle ne sortirait pas de la sphère. Elle attendit quelque instant, histoire que les murs relâchent leur attention, mais à peine avait-elle ébauché un mouvement de brasse qu’une attraction à peine perceptible la ramenait à sa place. A quoi s’attendait-elle, aussi ? ils ne regardaient qu’elle.


Elle changea sa position, essayant de s’asseoir en tailleur. Le silence était absolu depuis qu’elle s’était rendu compte qu’elle était enfermée. D’ailleurs, comment était-elle rentrée ? Elle ne se souvenait pas de s’y être réveillée, ou quoi que ce soit. Elle était dans la sphère, un point c’est tout. Comme elles. Se tordant le coup et le corps, elle les aperçut. Trois ombres. Elle avait maintenant l’impression qu’elles avaient toujours été là. C’est juste qu’elle n’avait pas été capable de les voir avant de les penser. Elles continuaient un dialogue orageux, commencé bien avant qu’elle ne les réalise. Il devait sûrement y avoir d’autres personnes dans la sphère, mais seules leurs ombres, agrandies par les courbes, étaient visibles. Des tiges sombres plaquées sur les murs blancs. Une voix appartenait à un homme, sans doute assez jeune. Une voix pâle et sèche, peu assurée et peu soucieuse d’être agréable. Une voix confite dans une routine ennuyeuse et qui n’apprécie pas qu’on l’en tire. La deuxième voix était celle, désincarnée, d’un hall de gare. La dernière, elle s’en aperçut avec un sursaut, était la sienne. Elle ne tremblait pas, mais elle pouvait sentir l’inquiétude en sourdre. Elle espérait que la voix de l’homme ne s’en rendrait pas compte. Il n’arrêtait pas de répéter les mêmes mots, tranchants comme de l'acier.
Fenêtre grenier, oiseau, cage, montre.
Et la voix de femme artificielle renchérissait
L’express de 12h14 à destination de Paris circulera voie voix.
A cela, sa propre voix répliquait avec hargne
Bougie, lanterne, tasse, beurre.
Etait-ce un jeu ? Sa voix n’avait pas l’air de trouver ça drôle, pourtant.
Serrure, retour, clé cadenas.
Le train de mission Zynk, à destination de la maison circulera avec un retard prévu entre cinq et dix minutes. Le train de mission Zynk à destination de la maison circulera.
Elle fronça les sourcils. Il y avait autre chose, tapi sous les mots incohérents. Les voix paraissaient proches, et elle les entendait distinctement, mais les vraies paroles essayaient d’apparaître dans les silences. En fermant les yeux, elle pouvait presque les sentir. Elles nageaient autour d’elle dans la sphère comme un banc de requins. La voix de gare apparaissait à intervalles réguliers, comme un phare de naufrageur. Sa voix à elle, c’était bien ça, la gardait en sécurité au centre. Les requins avaient beau la frôler, dans la sphère, ils ne pouvaient pas mordre. C’était la règle. Sa voix le disait bien. Elle l’avait juste oublié.
Règle sommeil sécurité, porte fermée.
Retour, retour, retour, éructait maintenant la voix masculine, mais de plus en plus faiblement.
Quand à la voix artificielle, elle annonçait désormais :
Prochain arrêt, réveil, prochain arrêt, réveil, alors que la mécanique de sa diction se déréglait de plus en plus.
Les voix palissaient. Elles essayaient de se retenir à la sphère, de la pénétrer, mais c’était peine perdue. Les souvenirs, même déformés, étaient bannis, elle l’avait décidé avant de s’y réfugier, et celui là ne ferait pas exception. Bientôt, tout s’effacerait.

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