jeudi 28 août 2008

Défi 3

Et le thème du jour est :


Vous êtes devant un feu.


J'en ai profité pour faire un petit clin d'œil aux contes du chat perché que j'adorais quand j'étais petite. Mais je n'y peux rien, j'aime pervertir les conte.


Un après-midi d'été



L’après-midi s'étirait en longueur. Le soleil avait assommé la ville. Plus rien ne bougeait dans les rues, hormis un chien errant désespérément à la recherche d’un peu d’ombre. Les habitants s’étaient réfugiés dans leurs maisons obscures et avaient pudiquement fermé les volets sur leur sommeil bienheureux. Comme d’habitudes, les enfants avaient eu le droit de rester hors du lit, à condition qu’ils jouent calmement et ne fasse pas trop de bruit. Sur leurs promesses, les parents s’étaient retirés.

Les poupées les avaient bien intéressées un peu, mais bon, elles n’étaient plus suffisamment bébé (elles prononçaient ça en tordant la bouche, comme s’il s’agissait d’une tare) pour jouer avec. Du moins, pas bien longtemps. Et puis le sol de la cuisine était ennuyeux avec ses gros carreaux irréguliers. Incidemment, Marinette était passée près de la porte, et le battant supérieur s’était entrouvert. Elle avait jeté, oh, rien qu’un œil. Juste quelques secondes. Et elle avait appelé « Delphine, Delphine, vient donc voir par ici ». Elle s’était donc approchée. A vrai dire, en voyant Delphine près de la porte, elle avait eu un soudain besoin de se lever. Le sol était froid, et sale. Malgré ce que disait la bonne, elle ne le lavait certainement pas tous les jours. En quelques secondes, elle était donc à côté de sa sœur. Derrière elles, Augustine avait suivie, sa poupée de bébé serrée dans ses bras. Naturellement, les sœurs l’ignorèrent. On ne parle pas à un bébé.

« Oh, Delphine, regarde ces fleurs, tu ne penses pas la poupée d’Augustine serait très jolie, si on lui tressait une couronne avec ? ».

Delphine avait plissé les yeux. Devant elle, l’herbe du jardin était jaune et brûlée. Mais de l’autre côté du ruisseau, elle devinait des taches colorées, qui devaient sans aucun doutes être des fleurs.

« Oui, Marinette, tu as raison. Je suis sûre qu’Augustine serait vraiment heureuse, si on lui faisait une belle couronne pour sa poupée. Et puis, si on n’y va pas, je suis sûre qu’elle va pleurer ».

« Oh non, on ne voudrait pas la faire pleurer », déclara sentencieusement Marinette ».

« Et puis ce n’est pas si loin. Même, on ne quittera même pas la propriété ».

« C’est vrai, après tout, Madame Leloup habite dans sa masure parce que père le veux bien, on ne peut pas dire que c’est chez elle ».

Sur ces bonnes paroles, les deux fillettes s’étaient mises en route, intimant à Augustine de garder la maison. Après tout, c’était important. Quelqu’un pouvait venir sonner au magasin alors que les adultes dormaient. Augustine devrait alors aller réveiller Maman, c’était sa mission. Et Delphine et Marinette lui apporterait de jolies fleurs pour sa poupée.

« Des rouzes ? », avait demandé la petite avec espoir.

« Oui, des rouges », avaient promis les deux autres.

Et bras dessus, bras dessous, elles avaient trotté à travers l’herbe brulée. La petite maison de Madame Leloup, ou plutôt sa cabane, de l’avis des deux filles, était encore plus laide de près. La terre et les fagots de bois qui la constituaient prenaient une vilaine couleur brune sous le soleil de l’été. Par contre, les fleurs qui poussaient devant étaient tout ce qu’il y a de plus jolies. Les fillettes avaient donc commencé à en faire deux gros bouquets pour cette pleureuse d’Augustine, s’interpelant quand elles trouvaient une fleur particulièrement jolie, ou un grillon. Bien sûr, elles avaient un peu peur. On disait que Madame Leloup était une sorcière. Mais les sorcières ne peuvent rien faire en plein, jour, c’est bien connu.
C’est pourquoi elles avaient hurlé quand la porte s’était ouverte. Madame Leloup se tenait sur le seuil, son méchant chat tout noir derrière elle, et un balai dans une main. Son gros visage était bouffi de colère.

« Non mais vous avez fini de me détruire mon potager, oui ? ».

Naturellement, les filles s’étaient mises à courir. Marinette avait hurlé qu’elle allait leur lancer un sort. Et Delphine qu’elle allait les poursuivre sur son balais. Alors Marinette avait crié encore plus fort qu’elle tenait un serpent mort dans les mains. Et Delphine avait rajouté qu’il y avait un crane dans son jardin. Quelle histoire ça leur ferait à raconter à Augustine ! Mais tout d’un coup, elles s’étaient aperçues que les gens courraient vers elles. Il y avait Papa, Maman, le commis, et même la bonne qui tenait Augustine dans ses bras. Les femmes avaient attrapé les fillettes pour les ramener dans la maison, pendant que les hommes s’approchaient de Madame Leloup. La porte s’était refermée vite, alors elles n’avaient pas pu tout voir.

Et puis ce soir, ils étaient tous sortis sur la grand place après le dîner. Il y avait tous les habitants de la ville. Le curé était arrivé, suivi des hommes du gué. Ils amenaient Madame Leloup, dans une grande robe blanche. Et puis le prêtre avait lu un long texte, en partie en latin. C’était ennuyeux comme la messe. Delphine s’était plutôt intéressée au drôle de mat planté au centre de la place et entouré de fagots. En voilà une idée saugrenue. A quoi cela pouvait-il donc servir. Et puis quand le prête avait fini de lire, ils y avaient attaché Madame Leloup, et avaient allumé le feu. Le bucher s’était embrasé en un instant. Le bois séché par le soleil ardent craquait joyeusement. Madame Leloup disparut derrière des flammes aussi rouges et hautes que les fleurs devant sa masure. Et Delphine et Marinette admirèrent le feu rouge comme les fleurs devant la masure, jusqu’à ce qu’il ne les réchauffe plus.


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